104factory l’incubateur des industries culturelles et créatives du CENTQUATRE-PARIS interroge chaque mois les startups autour d’un concept culturel.
Immersion, terme phare de la rentrée, est présent dans tous les discours et utilisé à toutes les sauces : musées, lieux culturels, œuvres artistiques et même au Ministère de la culture avec son axe de développement “L’immersion à l’horizon 2030”. Aujourd’hui pour innover dans les industries culturelles et créatives, il faut faire de l’immersion.
Mais qu’entendre par cette terminologie ? Qu’est ce que l’art immersif ?
Un concept qui pose autant de questions qu’il soulève d’intérêt : omniprésence des dispositifs numériques, intérêt des publics, nouveaux récits… Ne pouvons-nous pas demander à nos entreprises incubées à 104factory, leur avis sur l’immersion ?
Ainsi, 104factory l’incubateur des industries culturelles et créatives du CENTQUATRE-PARIS a interrogé Novaya, une société qui produit des expériences immersives artistiques utilisant la réalité augmentée.
Comment définir l’immersion ?
Étymologiquement, « immersion » vient du latin immersio qui signifie « acte de plonger dans l’eau ». Le terme d’immersion est utilisé en anthropologie, en sociologie et en géographie pour désigner l’acte de se situer sur un terrain d’étude : c’est l’observation participante dans un environnement, autrement une immersion culturelle qui implique un sens de l’écoute et un décentrement du regard. L’expérience immersive témoigne d’une faculté à envelopper, appréhender un environnement et, à terme, à générer du vécu.
Emanuela Righi, co-fondatrice de Novaya, voit de nombreuses similitudes entre la définition de l’immersion “se retrouver dans un milieu étranger sans contact direct avec son milieu d’origine” et leur activité. En effet, ils proposent aux publics d’être immergés dans un univers dépaysant dans un contexte de réalité mixte. Rester en contact avec le réel en intégrant une technologie virtuelle est une manière pour eux de raconter une histoire. Les décors réels et les dispositifs mis en place permettent aux visiteurs d’avoir accès à des éléments augmentés qui dépassent et transposent une autre réalité. Les installations de Novaya sont très faiblement interactives, l’intérêt pour eux est de faire vivre l’histoire, de tourner autour des hologrammes, de se mettre à la place des personnages qui sont à un pied d’égalité avec le public puisqu’ils sont à taille réelle et créent ainsi une confusion avec la réalité.
« Rester en contact avec le réel en intégrant une technologie virtuelle est une manière pour eux de raconter une histoire »
Zoom sur les terminologies que Novaya utilisent
Visiteur.euses
Dans ce terme, il y a la notion de déambulation, d’être immergé avec le corps contrairement au spectateur qui adopte une position plus passive. La manière de regarder et de ressentir est différente et lorsqu’on parle d’immersion, le public ne peut pas être considéré comme un simple spectateur.trice mais plutôt comme une personne qui vit l’expérience.
Réalité mixte
La réalité mixte est la capacité du dispositif immersif (des lunettes Hololens2) à prendre en compte l’espace réel, et ce, grâce aux capteurs intégrés. La position de l’utilisateur est également calculée en temps réel.. Plus simplement, une couche de virtuelle se plaque sur le réel. Dans le cas de Novaya se sont des hologrammes qui s’invitent dans le réel.
Quel est l’intérêt de l’immersion vis à vis du public ? Quelle relation crée-t-elle entre l’artiste et le public ?
Ainsi, la médiation culturelle est centrale dans leurs installations puisque Novaya souhaite impliquer les visiteur.reuses dans leurs expériences pour qu’ils ressentent un maximum d’émotions. Effectivement les sujets abordés sont parfois difficiles et il est important de pouvoir parler avec eux de l’expérience vécue et de ce qu’ils ont ressenti. Ici, c’est la technologie qui donne accès aux émotions, le public peut avoir l’impression d’être confronté à des véritables personnes alors qu’elles sont face à des hologrammes. Le visiteur.euse se met dans une position de fragilité liée à sa propre perception et ce qu’il connaît du réel.
L’artiste se retrouve lui aussi dépourvu de l’usage classique de son œuvre. Il s’expose dans sa qualité d’artiste car son œuvre est encore fragile du fait de l’utilisation de nouvelles technologies, dépendante d’aléas parfois incertains. Il peut donc y avoir un rapprochement avec le public, puisque lui aussi s’expose dans le bousculement de sa réalité. Ainsi des liens plus étroits entre ces deux acteurs sont générés à la suite de ce type d’expériences immersives. Ces œuvres vont se faire et se refaire par la contribution des visiteurs.
D’après Dominique Gélinas, « l’immersion est d’abord et avant tout une question d’échelle entre le visiteur et l’objet. L’éclatement du cadre de l’image et la perte des repères du monde réel en sont les principaux constituants. Ce qui est détecté par les sens devient la réalité pour le spectateur. »
L’objectif final de l’immersion est d’éveiller la curiosité de tous les visiteurs et visiteuses. Les installations de Novaya vont permettre d’aller chercher des publics plus connectés qui sont par exemple passionnés par les technologies, qui aiment jouer à des jeux vidéo. Néanmoins, ils souhaitent rencontrer d’autres publics pas uniquement jeunes, pour rendre ces expériences accessibles à toutes et tous. Cette question des publics est aujourd’hui cruciale dans le champ culturel puisque la volonté des institutions est de réussir à toucher un maximum de personnes
« L’objectif final de l’immersion est d’éveiller la curiosité de tous les visiteurs et visiteuses. »
Quels sont les enjeux de l’immersion dans l’art et la culture ?
La réalité augmentée (AR) reconnecte aux collectifs à la différence de la réalité virtuelle qui peut avoir tendance à proposer une expérience plus individuelle. Pour Novaya, l’AR crée un déplacement et permet aux visiteurs et visiteuses d’avoir des points de vue différents par les choix qu’ils vont réaliser. En effet, la question du parcours est centrale dans ce type d’installation, le public ne veut pas et ne perçoit pas la même chose. Ce qui est donc intéressant c’est d’analyser les décisions prises pour comprendre les comportements des expériences vécues qui sont toutes singulières.
Il est important de ne pas tomber dans l’effet de mode et de stabiliser au maximum cette technologie pour continuer à proposer des expériences singulières en les rendant plus accessibles. La recherche sur l’immersion reste centrale et il est nécessaire d’intégrer les nouveaux enjeux écologiques et sociaux dans le développement de ces technologies immersives.
Découvrir Novaya
Novaya est une société qui produit des expériences immersives artistiques utilisant la réalité augmentée. Novaya réunit des compétences plurielles, artistiques, techniques et de production, permettant d’assurer à la fois l’écriture des projets, la création visuelle de mondes réels et virtuels, ainsi que la fabrication de toutes les technologies innovantes nécessaires à leur réalisation.
en savoir +
Instagram
Linkedin
C’LE CHANTIER : Tania de Montaigne / Stéphane Foenkinos / Pierre-Alain Giraud
Noire
Installation immersive
Venez découvrir le prototype de Noire, une installation immersive en réalité mixte, adaptée d’un essai biographique écrit par Tania de Montaigne, produite par le Centre Pompidou et Novaya, une startup incubée à 104factory – l’incubateur des startups culturelles et créatives du CENTQUATRE-PARIS.
C’est l’histoire de Claudette Colvin, une jeune fille noire de quinze ans dans l’Alabama des années cinquante, qui refuse de céder sa place assise à une femme blanche dans un bus. Une Rosa Parks dont le geste révolutionnaire n’aura pas la même reconnaissance publique. Publiée soixante ans après les faits, la biographie (Prix Simone Veil 2015) plonge dans un moment de l’histoire américaine des droits civiques.
Suite à l’adaptation théâtrale de Stéphane Foenkinos pour laquelle Pierre-Alain Giraud (Novaya) a réalisé les films projetés sur scène, l’écriture d’une version immersive en réalité mixte (une version améliorée de la réalité augmentée en lien avec le monde réel avec un casque 3D) s’est imposée comme un prolongement nécessaire et complémentaire afin de transmettre l’histoire de Claudette Colvin et poursuivre l’œuvre de réhabilitation initiée par Tania de Montaigne.